samedi 23 avril 2011

Skyrock : quand les jeunes se mobilisent pour leur radio préférée

Depuis le 12 avril, jour de l’éviction de Pierre Bélanger-PDG et fondateur de Skyrock- au profit de Marc Laufer, la radio est en crise. Le lendemain de l’annonce de ce changement de direction, une centaine d’auditeurs manifestent devant les studios. Très vite, le mouvement prend de l’ampleur et les jeunes sont de plus en plus nombreux à manifester leur soutien à Skyrock, que ce soit à l’antenne, devant les studios ou via les réseaux sociaux.

On dit Skyrock en crise, mais cette crise est-elle différente de la crise structurelle et financière à laquelle sont en ce moment confrontés une partie des médias ? Bien que radio numéro 1 chez les moins de 25 ans, depuis 5 ans la radio ne donne plus de résultats satisfaisants. C’est donc logiquement le travail de Pierre Bélanger qui est remis en cause. AXA, actionnaire majoritaire, réclame un changement de stratégie au conseil d’administration de la radio, qui débarque Pierre Belanger, manu militari, et engage un « cost-killer », Marc Laufer, avec l’intention, à terme, de vendre.

Ces changements de direction inquiètent les salariés de Skyrock qui craignent des suppressions de poste. Ils lancent à leurs auditeurs un appel à la mobilisation à travers des jingles annonçant que "Skyrock, radio libre en danger de mort. A tout moment, Skyrock peut disparaître. La liberté de toute une génération est aujourd'hui menacée à tout jamais." Le ton est donné, et cette affaire de gros sous devient vite une affaire de société. Régis Soubrouillard, dans son article publié sur le site marianne2 le 22 avril explique comment Pierre Bélanger à mis en place une communication habile dans le seul but de conserver son poste. Selon lui, il est parvenu à faire d’Axa l’incarnation d’un système capitaliste qui met en péril la liberté des médias ; ce qui ne l’a pas empêché d’accepter le soutien du Crédit Agricole, qui à dès lors bénéficié de remerciements chaleureux à l’antenne : « Pierre Bélanger reste aux commandes de Skyrock. C’est grâce à vous, grâce à votre soutien, merci à tous, merci au Crédit Agricole » peut on lire sur le blog de Difool.

Toujours est-il que depuis le 13 avril, des centaines de milliers de messages de soutien ont été envoyés sur le site de la radio, sur le site du ministère de la Culture et de la Communication. Sur Facebook le groupe « Défendons la liberté de Skyrock » à crée le buzz en réunissant près de 600 000 signatures en seulement 3 jours : c’est un véritable record. Certains utopistes y voient une occasion pour la France de vivre « sa révolution Facebook », une référence toute relative aux révolutions qui ont agité le Maghreb ces derniers mois.

Les jeunes auditeurs, aux côtés de leurs stars préférées que sont la Fouine, Kenza Farah, Sinik ou encore Sexion d’Assaut manifestent leur crainte d’un assaut contre la culture rap et hip hop et la liberté de ton qui caractérise cette radio. En effet, elle fut une des premières à diffuser des émissions qui donnent la parole aux jeunes auditeurs. L’émission « Radio Libre », animée depuis maintenant 15 ans par Difool, est un énorme succès. La radio a surtout marqué le paysage médiatique en créant skyblog, qui avant d’être détrônée par Overblog en 2008, était la première plateforme de France. S’il est excessif de parler d’atteinte à la liberté d’expression, leur crainte d’une dénaturation de l’esprit Skyrock n’est pas infondée. En effet le positionnement musical de Skyrock, très ciblé vers le public rap/rnb, fragilise la stabilité financière de la station. On peut imaginer que pour sortir la radio de cette situation de vulnérabilité le nouveau dirigeant décide d’élargir le public visé et donc de diversifier les genres musicaux diffusés à l’antenne.

Ce que nous montre cette crise, c’est que, quoiqu’en disent les sondages et quoiqu’en pense l’opinion, les jeunes sont prêts à se mobiliser massivement et de manière efficace pour défendre des causes qui leurs sont chères, telle que la liberté d’expression. C’est ce qu’ont très vite compris les politiques en quête de popularité auprès des jeunes, qui ont été nombreux, à droite comme à gauche, à se presser au micro de la station. Cette crise montre également l’attachement des jeunes à certains médias traditionnels qui sont un élément constitutif de leur identité, et démontre leur capacité à utiliser conjointement « anciens » et « nouveaux médias ».M.Calon

Voir: http://www.youtube.com/watch?v=SCPB6UmYifQ&NR=1 et http://www.youtube.com/watch?v=76UPr0Cqsg4&feature=related

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